Contenus, technologies, écosystèmes, design, abonnements, sécurité et vie privée : les ingrédients magiques de la nouvelle stratégie du géant.

Cette semaine, Apple annonce au monde une kyrielle de nouveaux services, en live streaming, et à travers un show au cordeau, tout en noir et blanc : Apple Arcade (le premier service d’abonnement de gaming au monde), Apple Card (une carte de crédit disruptive), Apple TV+ (films, séries et documentaires), Apple News+ (plus de 300 magazines).

Cette offensive hyper-agressive, et de toute évidence très bien huilée, pose les bases du prochain Apple. Apple, qui voit les ventes de matériel stagner et même baisser, se tourne massivement vers le contenu et les services associés ; mais pas n’importe comment :

Des contenus qualitatifs

Que ce soit à travers les magazines (avec en tête de pont le Wall Street Journal ou le LA Times), le streaming TV (des stars, encore des stars : Oprah Winfrey, Kumail Nanjiani, Jennifer Aniston, Reese Witherspoon, Steven Spielberg, et caetera, et caetera…), le gaming (Where Cards Fall, The Pathless, Hot Lava..), ils sont allés chercher le contenu le plus qualitatif possible, et ils ont mis le paquet, avec des dépenses de plus de 1Milliard de $ depuis octobre 2017 en production de programme originaux… pour amorcer l’effet de réseau. De nouveaux programmes sont annoncés, créés spécialement pour l’occasion, sur des sujets chauds, comme la diversité, l’égalité homme-femme, le handicap, le stress et le harcèlement au travail. Le contenu est aujourd’hui un enjeu économique hyper stratégique, et Apple entend réclamer sa part du gâteau.

A la pointe de la technologie

Le machine learning, mentionné plusieurs fois, permet des algorithmes de recommandation hyper sophistiqués sur toutes les plateformes ; des technologies de réalité augmentée donnent de la profondeur et du mouvement aux magazines pour une expérience unique. En utilisant la dynamique des flux, des dioramas 3D, ils offrent une expérience de gaming bluffante. Et puis bien sûr de l’IA, par exemple pour identifier de façon claire et visuelle les transactions de votre carte de crédit (remplacez les lignes incompréhensibles de votre relevé bancaire par le logo des enseignes où ont été effectués les achats, et tout d’un coup, vos relevés deviennent digestes); de la cyber sécurité, du cryptage, un peu de blockchain, mixez le tout pour un mélange détonnant. Et tout cela soutenu par une architecture décentralisée de type Edge Computing. Dire qu’Apple coche pratiquement toutes les cases des tendances technologiques futures, est un doux euphémisme.

Plateformes & écosystèmes

On est là, devant un nouvel exemple de pivot de business modèle vers un modèle de plateformes, au pluriel. D’un modèle linéaire de supply chain, on passe à un modèle complexe d’agrégation d’écosystèmes de contenus : et celui qui orchestre l’écosystème, qui est au cœur de la plateforme business et technologique, capture l’essentiel de la valeur ; Apple ne s’y est pas trompé ; ils s’attaquent de front à l’orchestration de 4 nouveaux écosystèmes : magazines, gaming, tv et paiements. Certes ils avaient été pionniers sur ce modèle avec iTunes, mais depuis, la technologie a évolué de façon drastique, les modèles de marché également, ainsi que les habitudes de consommation ; le nouvel el dorado ne fabriquera pas que des vainqueurs, mais Apple à la puissance de frappe pour en être. Plateforme contre Plateforme, ils prennent de front les écosystèmes existants de Netflix ou Amazon par exemple. Quant aux paiements, GoldmanSachs et Mastercard qui se sont associés à cet écosystème, ont eu le nez creux.

Design

 

Et encore design; mais cela n’est pas une surprise, venant de la marque à la pomme. Design des plateformes, design des applis, design de la carte de crédit… Honnêtement, elle est tellement belle qu’on aimerait ouvrir un compte rien que pour la carte… Les banques s’insurgent déjà pour expliquer que cette carte n’a rien de nouveau, et c’est peut-être vrai d’un point de vue transaction pure, mais d’un point de vue design, on est assez loin de ce qui existe sur le marché pour le design de la carte, ou pour le design de l’appli. De là à lâcher mon Samsung pour un iPhone juste pour avoir la carte ? Qui sait….

Bref, sur ce point, Apple est là où on l’attend.

Vie privée & sécurité

“Apple ne collecte pas vos données “ ; “Apple ne sait pas ce que vous regardez, à quoi vous jouez, ou ce que vous achetez”

Le message est martelé. Une volonté claire de se différencier des autres GFAM, les premiers à faire de ce point un argument de vente ; et ça interpelle. Ils expliquent qu’en gardant les algorithmes près du point de consommation (iPad, iPhone, appletv..) les données ne sont pas rapatriées vers Apple qui n’a donc aucune visibilité sur vos préférences et consommation. Cette attention à la sécurité et la vie privée est un signe des temps, et la topology “edge computing” permet cela d’un point de vue technique.

Ceci dit, je serais surprise qu’Apple ne voit absolument rien de ce qui se passe en périphérie de son architecture IT : comment cibler le contenu que les consommateurs attendent si l’on ne sait pas ce qu’ils regardent. De plus, rien n’empêche les partenaires d’Apple de collecter vos datas : par exemple Goldman Sachs et Mastercard y sont légalement obligés.

Attendons maintenant la riposte d’Amazon et de Netflix, des banques, de Comcast, et de tous les autres acteurs majeurs de ces écosystèmes et de streaming de contenus…

Ah, et il nous faudra encore patienter pour avoir tout cela en Europe. Les premiers services seront disponibles en Angleterre à l’automne 2019 seulement. Et tant pis pour le Brexit, il n’y a pas encore vraiment de date pour le reste du vieux continent.

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